𝟏𝟗𝟖𝟓. Je viens d'avoir 18 ans (oui j'ai commencé sur le tard) et je débarque sur le nouveau continent (plus si nouveau que ça à ce moment-là d'ailleurs) pour une année dans une High School.
Autant dire que c'est à l'époque des cavernes. Une époque où les numéros de téléphone se composent encore du bout de l'index coincé dans un trou de roulette et où le GSM n'est forcément encore qu'un objet de science fiction, une époque où on s'écrit de bonnes vieilles et longues lettres et où on s'enregistrent les nouvelles sur des cassettes. Des cassettes que je reçois d'ailleurs dans un paquet avec un ravitaillement de bon chocolat belge et de gaufres 4/4, paquet qui met tellement de temps à arriver que 𝓳'𝓪𝓲 𝓵'𝓲𝓶𝓹𝓻𝓮𝓼𝓼𝓲𝓸𝓷 𝓭'𝓮𝓷𝓯𝓸𝓾𝓻𝓷𝓮𝓻 𝓵𝓮 𝓹𝓪𝓺𝓾𝓮𝓽 𝓭𝓮 𝓰𝓪𝓾𝓯𝓻𝓮 𝓻𝓲𝓮𝓷 𝓺𝓾'𝓮𝓷 é𝓬𝓸𝓾𝓽𝓪𝓷𝓽 𝓵𝓪 𝓬𝓪𝓼𝓼𝓮𝓽𝓽𝓮 (tellement les premières ont parfumé les deuxièmes).
En août de cette année-là, le jour de mon anniversaire, je quitte donc mon Allemagne natale pour perfectionner mon anglais et refaire une deuxième rhéto à deux pas de Washington. Rien à avoir avec le DC du même nom, non ici, c'est plutôt un bled situé dans le New Jersey, qui n'a de ronflant que son nom et le fait qu'il se situe à 1h30 de New York. Ma famille d'accueil vit même encore un peu plus loin, dans le charmant hameau de Harmony Township. 𝓐𝓾𝓽𝓪𝓷𝓽 𝓭𝓲𝓻𝓮 𝓵𝓮 𝓫𝓸𝓾𝓽 𝓭𝓾 𝓶𝓸𝓷𝓭𝓮!
J'atterris dans une famille sans enfants, un couple de quinqua (ou était-ce quadra?) dont l'épouse est responsable de la recherche des familles d'accueil pour le programme EF.
Personne ne voulait de moi, à 18 ans, je suis déjà trop vieille et peut-être trop belge et pas assez exotique. C'est donc la responsable qui me prend sous son aile et m'accueille chez elle.
𝓒𝓮 𝓹𝓻𝓲𝓿𝓲𝓵è𝓰𝓮 𝓷'𝓮𝓼𝓽 𝓹𝓪𝓼 𝓼𝓪𝓷𝓼 𝓼𝓪𝓬𝓻𝓲𝓯𝓲𝓬𝓮𝓼...
Entre autres celui de devoir montrer l'exemple et de devoir me conformer à quelques-uns de ses fantasmes. Parmi ceux-ci, celui d'intégrer la troupe des twirlings grils de mon école.
𝕿𝖜𝖎𝖗𝖑𝖎𝖓𝖌 𝖖𝖚𝖔𝖎????
C'est évidemment ce que j'aurais dû demander avant de dire oui!
Mais, fraichement débarquée, ne maîtrisant sans doute pas encore assez de vocabulaire et sans le courage nécessaire pour m'opposer à sa proposition (aurais je eu le choix?), je me plie aux volontés de cette mère de substitution. Je rejoins donc les Twirling girls, en d'autres mots : les majorettes !
Le ridicule ne tue pas heureusement! Mais il a bien failli me donner 𝖊𝖓𝖛𝖎𝖊 𝖉𝖊 𝖗𝖊𝖒𝖔𝖓𝖙𝖊𝖗 𝖉𝖆𝖓𝖘 𝖑'𝖆𝖛𝖎𝖔𝖓 𝖎𝖑𝖑𝖎𝖈𝖔 𝖕𝖗𝖊𝖘𝖙𝖔, quand j'ai vu le magnifique costume, on ne peut plus sexy (je vous laisse juger), que j'allais devoir porter!
Mon envie de rester un moment dans ce pays devait être plus forte. J'ai donc docilement suivi les entraînements et défilé à l'ouverture des matchs de foot, tellement populaires là-bas!
Chaque semaine, je m'appliquais et jonglais du mieux que je pouvais avec une carabine en bois. Et je peux vous dire que ça ne rigolait pas!!
Entre nous, j'ai tenu trois mois et puis j'ai réussi à négocier la jupe contre le short pour m'adonner trois fois par semaine au basket.
En attendant, j'ai quand même été majorette!
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